L’ostéopathie pédiatrique

A partir de quand faut-il emmener bébé chez l'ostéopathe ? A quelle fréquence ? Quels sont les problèmes ostéopathiques possibles ? Alexandre AUDIAT, ostéopathe, vous explique tout.

L’ostéopathie pédiatrique

A partir de quel âge les parents peuvent-ils emmener leur enfant chez l’ostéopathe ?

Il n’est pas question de « pousser les patients à la consommation ». L’habitude est plutôt de dire que tant que les enfants ne se plaignent de rien, il leur est inutile de consulter, mais qu’à partir de 13 ou 14 ans, il est bon de faire une séance d’ostéopathie de contrôle par an.

Les lésions ostéopathiques peuvent survenir à tout âge

Il y a un préjugé selon lequel les enfants, étant souples et plastiques, ne se bloqueraient pas facilement. Or, l’expérience montre que des lésions peuvent survenir à tout âge de l’enfance, y compris chez le nourrisson. Dans les faits, il est très rare, lors du bilan ostéopathique d’un enfant (fait à titre systématique) de ne trouver aucune anomalie.

En réalité, les problèmes de l’enfant sont semblables à ceux de l’adulte. 

Les lésions ostéopathiques apparaissent très tôt dans la vie

Les lésions ostéopathiques apparaissent très tôt dans la vie. Tout ce qui est d’ordre traumatique laisse sa trace dans le squelette. D’ailleurs les contraintes mécaniques que les enfants imposent à leur squelette sont souvent relativement violentes (sports, jeux, chutes, etc.), de sorte qu’il n’est pas rare de rencontrer de gros blocages de bassin chez l’enfant dès 10 à 12 ans.

Certaines petites lésions se corrigent toutes seules

Ce phénomène se produit vraisemblablement à tout âge, mais peut-être moins chez l’adulte, dont la structure est plus « organisée ». Reste que certaines lésions « labiles » disparaissent, par exemple au cours du sommeil.

Conseil sur la fréquence des séances d’ostéopathie pédiatriques

Conduite à tenir relative à la fréquence de séances ostéopathiques :

  • Si tout va bien : 1 contrôle par an suffit.
  • Mais en cas de blocage fort, touchant notamment le bassin, il faut traiter. Il semble d’ailleurs que les blocages de bassin (parfois très francs) sont fréquents chez l’enfant. Malheureusement l’idée des parents est que cela doit disparaître en une séance, alors que ce n’est pas toujours le cas. 

Le torticolis obstétrical du bébé (à ne pas confondre avec le torticolis congénital)

On lit parfois que l'« ostéopathie crânienne » traite avec succès les torticolis congénitaux. Il est donc nécessaire de bien préciser les définitions.

Qu’est-ce que le torticolis congénital ?

Le torticolis congénital est une maladie neuromusculaire, en dehors des indications ostéopathiques, car elle n’est pas due à un dérangement articulaire.

Si le diagnostic est certain, le meilleur traitement est la section chirurgicale du muscle, à faire à brève échéance. Cette maladie touche le muscle sterno-cléido occipito-mastoidien (SCOM) et entraîne en effet rapidement de grosses déformations crâniennes, cervicales et même sous-jacentes avec une scoliose adaptative, et « laisse des traces très tard si elle n’est pas traitée très tôt ». Il serait bon que cette notion « passe » dans le grand public, car elle est très utile : en pratique, il est très fréquent que le chirurgien récuse l’intervention urgente, et décide d’attendre 3 ou 4 ans, en comptant sur la possibilité d’une résolution spontanée dans un grand nombre de cas.

En fait le torticolis congénital provient d’une corde musculaire irréductible qui maintient la tête du bébé inclinée sur le côté. Et parce qu’elle est irréductible, il faut la sectionner sous peine de déformer son squelette très malléable à cet âge. 

Qu’est-ce que le torticolis obstétrical ?

A l’opposé, le torticolis obstétrical a pour origine la méthode d’extraction du bébé, plus que la position de la tête in utero comme certains le pensent.

L’obstétricien et/ou la sage-femme ne commette pas de faute, mais pour sortir certains bébés, il faut exercer une traction non négligeable, qui, bien souvent, entraîne des lésions articulaires cervicales, à type d’entorse. Cette conséquence est d’ailleurs quasiment la règle en cas d’utilisation des forceps.

Le torticolis obstétrical peut se présenter selon 2 tableaux :

Au début, surtout dans les 15 premiers jours, le problème n’est pas toujours évident.

Idéalement, il faut 1 mois de délai, en conformité avec l’évolution tissulaire, pour bien percevoir le niveau en cause. Ainsi, si l’on examine le bébé très tôt, la lésion n’est pas « organisée » et même reste mobile. Mais après 1 mois, en passant un doigt le long de la colonne cervicale, on perçoit comme un « petit haricot ». Si la pression est insistante sur ce « haricot », le bébé se manifeste souvent par des cris, à cause de la douleur.

La plagiocéphalie

Le 1er tableau est le plus classique : dans sa forme complète, le bébé tient sa tête toujours du même côté, avec pour conséquence rapide (dès le 1er mois) une déformation crânienne importante à type de plagiocéphalie. Il s’agit d’un aplatissement latéral crânio-occipital situé du côté vers lequel le bébé tient sa tête. La plagiocéphalie est souvent accompagnée des signes suivants :

  • Le bébé est souvent grognon, ce qui se manifeste différemment selon son tempérament : ainsi, s’il est plutôt placide, il se plaint moins souvent, mais réagit quand on le mobilise, par exemple lors du changement de couche, ou si on le déplace vers un siège ou un lit, etc.
  • Régurgitations et/ou coliques.
  • Réveils nocturnes fréquents. S’il est placide, ce qui est le plus banal, il se réveille 2 ou 3 fois par nuit en gazouillant, et sa mère pense qu’il a faim, parce qu’alors elle lui donne la tétée ou le biberon, le recouche et constate qu’il se rendort. Mais l’inconfort peut aller jusqu’aux pleurs dès le couchage, car le bébé appréhende sa nuit et les souffrances qui vont avec.

Souvent, les parents reçoivent le conseil de faire faire de l’ostéopathie crânienne, qui prétend résoudre le problème en 3 à 4 mois. En réalité, le soulagement ne doit rien à l’ostéopathie crânienne mais au fait que l’entorse se « sèche ».

On dit aussi souvent aux parents de faire en sorte que le bébé tourne sa tête de l’autre côté, en le sollicitant à cet effet. En fait ce conseil est inapproprié car il va à l’encontre d’une position antalgique et oblige l’enfant à solliciter son entorse. 

L’entorse bilatérale

Le 2ème tableau est plus serein : il s’agit de l’entorse bilatérale, dont les manifestations douloureuses sont moins marquées. L’enfant tourne un peu sa tête d’un côté et de l’autre et le plus souvent les parents ne remarquent pas l’anomalie. En fait, les amplitudes de rotation à droite et à gauche sont limitées. De plus :

  • Signe quasi-pathognomonique : le bébé fait souvent des mouvements de redressement du cou en relevant le menton et en soulevant la tête voire le thorax.
  • Le bébé grogne quand on le penche vers l’avant pour lui donner le sein. 
  • La déformation crânienne qui s’installe est un aplatissement postérieur du crâne avec décollement des oreilles (brachycéphalie).

C’est une entorse cervicale qui provoque une déformation crânienne parce que le bébé dort sur le dos avec le menton relevé, sans tourner vraiment la tête parce qu’il manque d’amplitude. Le crâne des nourrissons étant très malléable, il se déforme en fonction des déformations qu’il subit.

L’évolution

Suite au traitement ostéopathique, plusieurs possibilités se présentent :

a. Le bébé dort bien, et même beaucoup, la nuit suivante, ce qui contraste avec les réveils nocturnes fréquents des nuits précédentes (ce changement, pourtant très favorable, peut même inquiéter les parents !).

Cette hypothèse est la plus favorable et la plus fréquente : hormis les cas de malformation digestive (ce qui est un diagnostic à évoquer), les régurgitations, « colites », pleurs, et même parfois les otites séreuses si l’enfant est vu plus tard, etc., cessent. Tout va bien.

Si le bébé est vu dès le 1er mois, la déformation crânienne ne s’installe pas, ou disparaîtra dans les mois qui suivent si elle avait commencé à s’installer, et cela dès la 1ère séance. Pourtant, il est de bon usage de faire un contrôle 3 semaines plus tard.

b. Parfois (20 % des cas), le bébé est un peu plus agité. Il avait mal la nuit, à présent il se tourne et se retourne toute la journée. Cela traduit généralement que l’entorse n’est pas complètement corrigée.

Ce cas de figure est naturellement plus fréquent chez un bébé vu tardivement que chez celui qui est vu dès le 1er mois. Toujours est-il que cela inquiète les parents : il faut donc les prévenir à l’avance de cette possibilité. Si cela arrive, on leur demande de patienter 48 heures et de revenir si l’agitation persiste : dans l’immense majorité des cas, ce délai de 48 h suffit pour que l’agitation cesse spontanément.

c. Plus rarement : rien n’est amélioré. Cela survient généralement quand le praticien a bien corrigé le cou mais n’a pas contrôlé les vertèbres dorsales supérieures. Cette zone doit donc être vérifiée systématiquement.

d. Si l’entorse ne reçoit aucun traitement :

  • Elle persiste et se « sèche ». Comme il y a au niveau cervical une articulation tous les 2 cm, l’ensemble du cou fonctionne malgré le blocage de l’une d’entre elles. Cette situation n’est pas forcément préoccupante s’il n’y a pas de conséquences, neurovégétatives ou autres. Mais l’intérêt du traitement ostéopathique est qu’il est efficace, rapide et satisfaisant.
  • On voit souvent des enfants de 12 ou 13 mois dont le crâne est déformé et les oreilles plus ou moins décollées. Cette situation se corrige beaucoup plus lentement, et malgré les années il restera toujours une certaine déformation.
  • Toute entorse non corrigée constitue une contrainte articulaire supplémentaire. On entend souvent des mères dire quelques années plus tard : « mon enfant a fait ses nuits au bout de x mois ». En réalité, ces enfants avaient très probablement une entorse cervicale, car en dehors des 15 premiers jours, un bébé qui ne fait pas ses nuits est un bébé qui souffre. 

Autres problèmes ostéopathiques possibles

Souffrance au niveau des épaules

Il n’est pas rare non plus que le nourrisson souffre de ses épaules : il arrive en effet que les épaules aient été forcées, et leur vérification devrait elle aussi être systématique. Ce problème va de la simple gêne douloureuse jusqu’à la paralysie par lésion du plexus brachial, non exceptionnelle, en passant par les fractures de la clavicule, voire de l’humérus.

Incidence digestive

Sur le plan physiopathologique, on est frappé par l’incidence digestive des entorses cervicales du nouveau-né, et l’on parle souvent, par exemple, du nerf pneumogastrique, en fait tant de cheminements nerveux sont possibles que de nombreuses explications peuvent se discuter. La fonction première du nourrisson est de se nourrir, et que toute son organisation est principalement « neuro-digestive », de sorte que toute anomalie susceptible d’irriter le système nerveux aura sa manifestation digestive (diarrhée, colique, reflux gastro-œsophagien, etc.). L’entorse joue le rôle d’une « épine irritative » dans la vie majoritairement neurovégétative du nourrisson.

Notions relatives à l’agression articulaire (valables d’une manière générale)

L’entorse cervicale correspond à une articulation qui a été forcée au-delà de son amplitude normale, lors du travail qu’effectue l’obstétricien et/ou la sage-femme pour aider le bébé à sortir. Comme toujours en cas d’agression articulaire, les muscles se mettent en état de spasme, et ce spasme entraîne un positionnement faussé des os l’un par rapport à l’autre. Ce positionnement faussé tire sur la capsule articulaire, d’où un spasme qui entretient sa propre cause. Il s’agit typiquement du problème de la lésion ostéopathique : toute agression articulaire perturbe le fonctionnement articulaire à cause du spasme nociceptif (douloureux).

À l’inverse, quand l’entorse qui vient de se produire est vue avant l’instauration du spasme, elle n’est pas facile à traiter parce qu’elle se présente comme une hypermobilité, due à la sidération des éléments de contention de l’articulation. C’est secondairement que la contracture s’installe et tire l’os dans une direction. Ensuite, l’os tiré dans une direction tiraille sur la capsule articulaire et le ligament, ce qui maintient la contracture et le cercle vicieux.

Au début, tant que le spasme n’est pas instauré, on ne peut pratiquement rien faire, car en définitive, notre travail revient à lever le spasme musculaire.

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